Devant se conformer aux règles éthiques de la profession, l’infirmière libérale ne peut pas, sauf dans quelques cas très rares et strictement encadrés par la loi, faire de publicité. Aussi, lorsqu’elle est confrontée à une forme de concurrence déloyale, elle n’a d’autre solution que de saisir la justice.
Les infirmières libérales, des professionnelles de santé très concurrencées au quotidien !
On ne reviendra pas sur les nombreuses oppositions voir même sur les différentes formes de concurrence que l’hospitalisation à domicile (HAD) peut représenter vis-à-vis des infirmières et infirmiers libéraux. Ces derniers peuvent aussi collaborer avec telle ou telle structure de HAD d’un côté, tout en souffrant de certaines formes de concurrence « déloyale ». Mais une infirmière libérale doit aussi se frotter à ses confrères et consœurs, installés sur le même territoire qu’elle. La concurrence entre infirmières libérales existe même si elle ne peut pas donner lieu à une communication de l’une ou de l’autre, puisque toute publicité est interdite, comme nous l’avons déjà évoqué.
Au quotidien, d’autres structures peuvent concurrencer, de manière plus ou moins frontale, l’activité de l’infirmière libérale. Les aides-soignants à domicile peuvent ainsi « remplacer » une infirmière libérale, même s’ils sont tenus, par définition, à se limiter à des soins basiques en plus de leur mission de prévention, de surveillance, …. Il s’agit alors d’une véritable forme de concurrence déloyale, d’autant plus lorsque ces aides-soignants interviennent pour le compte de Services de Soins à Domicile (SSIAD) notamment. En effet, contrairement aux infirmières libérales, ces SSIAD connaissent une plus grande latitude pour promouvoir leur activité. Il n’est pas étonnant, dans ce contexte, que les aides-soignants revendiquent, depuis longtemps, le transfert de certaines compétences dévolues jusque-là aux infirmières libérales.
Les services de soins à domicile, des prestations multiples pouvant prêter à confusion !
Bien souvent, les services de soins à domicile proposent à leurs patients/clients des prestations relevant plus de l’aide à domicile que de véritables soins. En théorie, cela ne pose aucun problème particulier à une infirmière libérale d’intervenir chez un patient ou une patiente, qui a recours à ce type d’aide à domicile pour le portage des repas ou l’entretien dudit domicile. En effet, les deux activités ne sont pas par nature comparables, et que deux intervenants extérieurs soient sélectionnés pour répondre à l’ensemble des besoins du patient semble même la solution la plus adaptée à ce type de situation. Mais, de la théorie à la réalité du terrain, il existe une grande différence, face à laquelle les infirmières et les infirmiers libéraux se trouvent confrontés. C’est ce que révèle un récent jugement du tribunal de grande instance de Châteaudun (28).
Lorsque les infirmiers libéraux réussissent à faire reconnaître leurs droits
36 infirmières et infirmiers libéraux de Châteaudun se sont en effet regroupés sous forme de collectif pour porter plainte contre une association d’aide à domicile. Le motif de la plainte : concurrence déloyale. Cette association, créée au départ pour apporter de l’aide à domicile, a développé, au fil du temps, un véritable service de soins infirmiers. Ce développement s’est fait en toute légalité, mais ce n’est pas cela, que les infirmiers libéraux leur reprochaient. La concurrence déloyale provenait bien de la confusion pouvant exister entre l’activité d’aide à domicile et celle de soins à proprement parler. C’est cette confusion, que le TGI de Châteaudun a condamné en expliquant dans son jugement : « En joignant individuellement chacun des bénéficiaires du SADS domicile pour lui proposer de faire appel au SADS santé en cas de besoin en soins infirmiers, l’association s’est rendue coupables d’actes de compérage« . Pour condamner ce détournement de clientèle, le jugement a imposé à l’association de créer deux lignes téléphoniques distinctes pour chacune de ses deux branches d’activité.
Il ne s’agit nullement de crier victoire, mais bien de souligner que lorsque cette distorsion existe entre l’idéal imaginé en théorie par le législateur et le quotidien de l’infirmière libérale, la seule solution s’offrant à elle reste de saisir la voie judiciaire, puisqu’il lui est strictement interdit de communiquer sur son activité.
Et vous, avez-vous déjà été confronté à pareille concurrence déloyale ? Et si oui, quelle a été votre attitude ?