L’Assurance Maladie a réalisé une enquête exclusivement consacrée aux fraudes en ce qui concerne les remboursements des soins infirmiers en ville.
L’Assurance maladie, et son ambition de lutter contre toutes les fraudes sociales
Depuis plusieurs années, la Cour des Comptes alerte, dès que l’occasion lui est donnée, sur l’absence d’évaluation fiable des fraudes sociales. Si le grief des hauts magistrats concerne de nombreuses administrations, l’Assurance Maladie est souvent pointée du doigt, notamment en ce qui concerne les efforts déployés pour évaluer précisément le montant et la nature des fraudes mais aussi pour mettre en place des actions concrètes et efficaces pour réduire le montant de ces dernières. C’est en réaction à ces appels à réaction, que l’Assurance Maladie a ainsi multiplié les enquêtes et les études ces derniers mois, dont l’une directement centrée sur les infirmières et les infirmiers libéraux. Deux rapports ont ainsi été dévoilés par l’Assurance Maladie en ce mois de mai 2022.
Le directeur de l’Assurance Maladie, Thomas Fatome, a ainsi présenté devant la mission d’évaluation et de contrôle du Sénat une première étude liée aux risques spécifiques des remboursements des soins. Plus précisément, une évaluation a été faite pour identifier les fraudes rattachées à la Complémentaire Santé Solidaire (C2S). Évaluée à 25 millions d’euros, soit seulement 1.22 % des prestations versées, cette fraude est cependant relativisée par l’Assurance Maladie. Si 15 % de ces fraudes identifiées sont directement imputables à une « sous-déclaration des revenus », l’étude souligne également que 5 millions de bénéficiaires potentiels n’ont pas demandé la Complémentaire Santé Solidaire, soit une « non-dépense évaluée à 2milliards d’euros ».
Une étude pour étudier la fraude des infirmières et infirmiers libéraux
La deuxième étude retient plus encore l’attention des infirmières et des infirmiers libéraux, puisqu’elle est centrée sur les remboursements des soins infirmiers en ville. Pour l’Assurance Maladie, il était essentiel de conduire une telle étude, au vu de l’importance du budget des remboursements des soins infirmiers, évalués à 10 milliards d’euros pour tous les régimes, dont 7.5 milliards pour le seul régime général. Ce budget « Infirmiers Libéraux » devait donc être contrôlé, comme l’avait souhaité la Cour des Comptes. Et l’Assurance Maladie conclut que la fraude n’est pas marginale, puisqu’estimée entre 5 et 6.9 % des dépenses remboursables, soit entre 375 et 515 millions d’euros pour le seul régime général.
Cette étude a permis d’identifier les origines de cette fraude, et l’Assurance Maladie souligne ainsi l’existence de :
Le non-respect de la nomenclature des actes par les infirmières et infirmiers libéraux
Une surfacturation des indemnités kilométriques. Selon le pré-rapport, cela serait à l’origine de 62 % des dossiers de fraudes identifiées pour 39 % du préjudice total,
Une facturation de soins non-dispensés, constituant une « escroquerie à la facturation »
Une facturation multiple des mêmes soins. Cela constituerait 22 % des dossiers incriminés pour environ 38 % du préjudice financier.
L’Assurance Maladie met également en avant les conséquences que peut jouer la mauvaise répartition des infirmières et infirmiers libéraux sur le territoire. Ainsi, dans les régions où les IDEL(s) seraient trop densément installés, cette « surpopulation » de la profession serait un facteur incitatif au recours à ces techniques frauduleuses. L’Assurance Maladie pointe également l’insuffisance d’agents, chargés de contrôler les infirmières et infirmiers libéraux. Dans le même temps, elle souligne que grâce aux algorithmes et à l’intelligence artificielle, les ciblages de ces contrôles sont bien plus efficients. Cette corrélation entre zones su-dotée et fraudes avait déjà été pointée du doigt par la Cour des Comptes en 2015. Quoi qu’il en soit, si l’Assurance Maladie reconnait que la fraude des infirmiers libéraux représente bien un sujet contre lequel elle doit lutter, elle admet également que la tâche est complexe et difficile, préférant une action en amont de ces actes condamnables. Elle rappelle ainsi, que toutes les nouvelles infirmières libérales connaissent un « contrôle à blanc », suivi dans les 8 mois suivant leur début d’activité, d’un contrôle en bonne et due forme. D’autres mesures pourraient être dévoilées dans les semaines à venir.
Et vous, comprenez-vous que cette fraude des infirmières et des infirmiers libéraux soit considérée comme problématique ? Que vous inspire cette étude sur l’activité des IDEL(s) ?