« La Santé en France en urgence absolue ». En un slogan, les soignants hospitaliers ont résumé la situation en se mobilisant le 7 juin dernier. Le constat est partagé par tous les acteurs de santé et les infirmières libérales et hospitalières partagent ce terrible état des lieux, même si la profession a également des solutions pour en sortir.
La santé est en crise, et la mobilisation des personnels hospitaliers ces derniers jours n’en est qu’une conséquence. Mais les soignants de ville sont eux-aussi mobilisés, portant des revendications qui leur sont certes propres et spécifiques mais qui poursuivent le même but : « Sauver le Système de Santé en France avant qu’il ne soit trop tard ». Les infirmières libérales ou hospitalières, jeunes ou expérimentées, en ville ou en zone rurale, partagent cette ambition et nourrissent cette même colère. C’est ce qu’il ressort d’une vaste enquête réalisée par l’Ordre National des Infirmiers (ONI) auprès de plus de 40.000 infirmières et infirmiers.
La désertification médicale, une angoisse pour les patients, une réalité pour les infirmières libérales
Les inquiétudes des citoyens face à la progression des déserts médicaux en France sont largement partagées par la profession infirmières
Plus de 9 infirmières sur 10 inquiètes de la situation
Si 43 % des infirmières interrogées se déclarent « très inquiètes » sur la situation en matière de soins, 93 %, soit la quasi-totalité de la profession, avoue son inquiétude. Et cela concerne tous les aspects de cet accès aux soins pour les patients, depuis les délais pour obtenir un rendez-vous (96 %) jusqu’à la fermeture continue de lits à l’hôpital (79 %).
Les infirmiers dénoncent l’absence d’égalité d’accès aux soins
Les conclusions pour les infirmières et infirmiers sont sans appel : Plus de deux professionnels sur 3 (68%) jugent qu’il « n’existe pas d’égalité d’accès aux soins ». Difficile à vivre quand on a choisi ce métier par vocation, ce constat terrible est partagé par les patients eux-mêmes. Lorsque l’on interroge infirmières libérales ou hospitalières sur les inquiétudes de leurs patients, cette difficulté d’accès représente le principal sujet (77 %), avant même le manque de clarté et d’explication sur le parcours de soins (55 %) ou encore la peur de la dépendance pour soi ou ses proches (52 %).
La profession infirmière, un socle pour repenser l’organisation des soins en France ?
Face à ce constat, et alors que les autorités publiques reconnaissent la pénurie d’infirmières tant en ville qu’à l’hôpital, la profession souligne son ambition de participer à cette refondation de la santé en France.
La profession infirmière, un pilier pour répondre aux enjeux de demain
L’ensemble des infirmières et des infirmiers interrogés (97 %) soulignent qu’ils sont essentiels pour le maintien des patients à domicile. Et cette capacité à « aller vers » les patients isolés et/ou âgés répond, pour 3 infirmières sur 4 (74 %), à l’un des principaux enjeux de société. Face au vieillissement de la population, les infirmières, et notamment les IDEL(s), ont pris conscience du rôle qui était le leur et de l’importance de ce dernier, bien au-delà de la santé. Pour 71 % des répondants, l’infirmier contribue également à renforcer le lien social.
Les infirmières, de la vocation au découragement
Si les différents constats dressés par la profession ne sont pas nouveaux ni même inconnus des autorités sanitaires, ils soulignent néanmoins le désarroi d’une profession, qui, à 82 %, se déclare fière d’exercer. Pourtant, les infirmiers interrogés déplorent une dégradation des conditions d’exercice (88 %), tant en ce qui concerne la relation aux patients (71 % des infirmières regrettent de ne pas avoir assez de temps à leur consacrer) qu’en ce qui concerne leur gestion de carrière (près de deux infirmières sur 3, 61 %, sont insatisfaites de l’équilibre entre vie perso et vie pro).
La profession prête à participer à la refondation du système de santé
Si les infirmières et infirmiers interrogés partagent donc le même constat qu’une grande partie des acteurs de la santé, elles se disent prêtes cependant à participer aux transformations et évolutions nécessaires. Des mesures déjà proposées suscitent l’adhésion de la profession, comme notamment la définition de ratios « infirmiers par patient » (80 %). Mais les infirmières libérales et hospitalières sont également convaincues, que ces évolutions ne pourront se réaliser que si la profession est davantage considérée et respectée.
Les infirmières veulent participer activement à ces évolutions
Pour la profession, les infirmières ne sont pas suffisamment informées et encore moins sollicitées quand il s’agit de décider des politiques publiques en matière de santé. Ainsi, 3 infirmières sur 4 (74 %) avouent ne pas se « sentir bien informées des politiques publiques de santé ». Toutes les infirmières ou presque (97 %) estiment que la profession doit être impliquée dans cette prise de décision. La profession tout entière est consciente du rôle central qu’elle doit tenir, et pour cela elle se doit d’être reconnue à sa juste place. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que la très grande majorité des infirmières (86 %) déplore le « manque d’IDE dans les instances de gouvernance des établissements de santé ».
Les infirmières de demain : quelles évolutions pour répondre à la situation ?
Les propositions des infirmières ou infirmiers ne sont pas révolutionnaires mais répondent point par point au constat dressé. Ainsi , 94 % des infirmières interrogées appellent à une actualisation urgente du décret infirmier, afin que ce dernier prenne en compte la réalité des soins d’aujourd’hui. Le développement de la consultation infirmière sans prescription médicale (60 %), la prescription infirmière des actes simples (58 %), de nouvelles missions en ce qui concerne prévention et éducation thérapeutique (70 %), la reconnaissance des soins relationnels prodigués par l’infirmière (86 %), … sont autant de revendications déjà portées, ces derniers temps, par la profession.
Cette vaste enquête de l’ONI dresse donc un état des lieux précis de la profession, avec une demande urgente donc : la réforme du décret infirmier. Le président de l’ONI, M Patrick Chamboredon, explique que tout est réuni pour avancer vite sur le sujet.
« Le dossier est sur la table de la nouvelle ministre de la Santé. L’Ordre national des infirmiers est au travail pour faire avancer cette réforme, qui doit être à la hauteur des attentes et des enjeux ».
Si la profession, dans son ensemble, partage les mêmes jugements et propose les mêmes solutions pour sortir de cette crise profonde, on peut toutefois souligner une division en ce qui concerne la manière d’agir. En effet, pour 60 % des infirmières interrogées, le constat est déjà connu, et l’urgence consiste à prendre des décisions rapidement, dans les 6 mois à venir. En revanche, pour 30 % des répondants, il faut au contraire prendre le temps de la réflexion et « mettre tous les acteurs autour de la table pour dialoguer à l’occasion d’une grande consultation sur la santé ». Il reste donc à attendre, quelle position sera suivie par la nouvelle ministre de la Santé ?
Pour vous, faut-il passer à l’action immédiatement ou prendre le temps de faire un tour de table ? Quelles sont selon vous les principales mesures à prendre ? Pensez-vous que cela sera pris en compte par le gouvernement en place ? A quel horizon, voyez-vous la situation des infirmières s’améliorer réellement ?
05 juillet 2022
Pour commencer, enlever définitivement le mot "contrôle" du langage et de l'état d'esprit insupportable des caisses d'assurance maladie qui font régner la terreur auprès des jeunes. Une convention n'est pas un pouvoir de suspiscion perpétuelle mais devrait être un partenariat pour trouver ensemble des solutions au lieu de faire porter sur nos seules épaules les situations complexes. Nois creins des liens forts avec nos pantients mais ces attitudes insupportables de l'administration font fuir les jeunes infirmières qui ont peur de s'installer en libéral, même parrainées par une ancienne et on les comprend!
04 juillet 2022
Infirmière un métier à réinventer