L’infirmier dans le rôle de patient - Albus, l'appli des infirmiers

L’infirmier dans le rôle de patient

Quand l’infirmier devient le patient…

L’état des lieux est sans appel, le personnel médical qu’il soit médecin, aide-soignant, infirmier en hôpitaux ou infirmier libéral souffre et bien trop souvent en silence. Si la pénibilité de leur travail et des risques professionnels liés est une évidence, aussi étrange que cela puisse paraître, le soignant  ne se soigne pas assez !

Les maladies et les risques professionnels de l’infirmier

Entre les heures de travail accumulées de jour comme de nuit, le stress, le port de charges lourdes, le contact avec les maladies infectieuses et les nombreux trajets sur la route entre deux patients, les risques sont multiples et bien plus importants que dans n’importe quel autre type d’activité.

Peu de données chiffrées existent sur le sujet, toutefois une enquête de pénibilité professionnelle auprès des auxiliaires médicaux établie en 2008 par la CARPIMKO, caisse maladie pour les libéraux, nous informe sur leurs conditions de travail.

Elle constate que 53 % des infirmiers libéraux travaillent plus de 50 heures par semaine et surtout que, selon l’avis de 89 % des infirmiers, les risques d’accident du travail ou de maladies professionnelles sont bien plus importants que pour la moyenne des travailleurs français.

On notera tout d’abord la mention des difficultés physiques, 51 % des infirmiers libéraux estiment que leur métier est très difficile physiquement. Puis on observera que les conséquences psychologiques sont vécues comme très problématiques pour 32 % d’entre eux. Malgré tout ils sont 88 %, tous auxiliaires médicaux confondus, à être très satisfaits de leur métier malgré les difficultés de santé qu’il impose.

L’amour du métier doit-il pour autant faire aimer l’amour du risque ? Non, pourtant on entendra bien souvent qu’il n’a pas plus « mauvais » patient qu’un personnel soignant…

« Les soignants médecins et paramédicaux se préoccupent peu de leur santé… » constate Madeleine Estryn-Béhar, médecin du travail ergonome.

Quand le soignant décide de se soigner : une dualité délicate

Comme nous l’avons noté, il semble complexe de faire l’échange des rôles, beaucoup de causes sont liées à ce constat. Tout d’abord la difficulté d’admettre son impuissance face à sa propre maladie alors que l’on guérit des patients constamment, en particulier pour les médecins à qui cela impose de « devoir lâcher prise tout en gardant un certain contrôle de la maladie« .

Puis viennent aussi les questions du travail, de la complexité d’un remplacement,  et de la prise en charge financière, en particulier pour les libéraux qui, rappelons-le, cotisent à des organismes privés. Selon les cas et les pathologies, les caisses privées ne sont pas généreuses en matière d’arrêt-maladie. On se souviendra par exemple du cas de cette infirmière libérale qui a écrit une lettre au président de la République pour dénoncer le manque de prise en charge de sa grossesse pathologique.

Toutefois, la maladie l’emporte parfois sur toutes ces contraintes et arrive alors le moment où, qu’il le veuille ou non, le soignant devient le patient. Deux types de comportements seront observés dans ce cas : soit il manifestera clairement ses connaissances médicales soit il se taira sur sa profession afin d’être traité comme un patient « normal ».

Afficher clairement des compétences égales de son lit d’hôpital au médecin ou à l’infirmier qui vous traite peut être à double tranchant : soit l’information est bien comprise et incite à une sorte de  travail en équipe, soit elle est traitée comme une volonté de toute puissance et peut devenir nocive dans la communication entre soignant et soigné. Une praticienne hospitalisée témoigne par exemple qu’elle s’est vue rabrouée par une infirmière lui disant « Laissez-nous faire notre boulot !« . Le tout étant peut-être de trouver un juste équilibre, même si la difficulté de ne pas critiquer d’un œil connaisseur les soins que l’on se voit administrer semble grande.

D’autres soignants ont trouvé la solution inverse : ils ne disent absolument rien de leur métier ! Ainsi un généraliste de 50 ans confie « Je trouve qu’on est largement mieux soigné quand on est incognito que quand on est dans l’intimité avec les confrères« .

Unanimement les témoignages de soignants devenus malades se rejoignent sur ce point : leur passage de « l’autre côté de la barrière » a considérablement changé leur façon de travailler une fois remis sur pied. Une nouvelle façon de gérer la douleur de son patient quand on a soi-même souffert de l’attente d’antalgiques, une nouvelle façon de s’adresser aux malades quand on manqué d’écoute ou d’informations durant son hospitalisation.

Mélanie, une infirmière blogueuse ayant souffert d’une grossesse extra-utérine, explique : « Je comprends juste que lorsqu’on est soigné, on n’a pas du tout la même notion du temps que lorsqu’on est soignant…« . Cinq minutes pour une infirmière surchargée qui court d’un patient à l’autre ne seront jamais les mêmes que cinq minutes de détresse d’un malade qui l’attend.

Une formation douloureuse mais qui offrirait un autre regard sur la profession ? Peut-être. Un mal pour un bien alors, ce serait déjà cela…

Et vous les infirmiers libéraux prenez-vous soin correctement de votre santé ? Avez-vous déjà été dans la posture du soignant-patient ? Comment l’avez-vous vécu, cela a-t-il changé votre façon de concevoir votre métier ?

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