
Les prévisions démographiques appellent à une forte hausse du nombre d’infirmières et d’infirmiers
Aujourd’hui, les débats autour des professionnels de santé en général et des infirmières libérales ou hospitalières en particulier se cristallisent autour de la problématique des déserts médicaux. La pénurie de professionnels de santé inquiète autant les étudiants, que les patients, les représentations syndicales que les autorités publiques. Mais pour organiser au mieux le système de santé en tenant compte de cette situation, les spécialistes et les observateurs se doivent également de se projeter dans l’avenir afin d’anticiper les nouveaux problèmes pouvant apparaître dans les années à venir. C’est ce qu’ a fait un géographe spécialiste des questions de santé, M. Olivier Lacoste, pour le compte de l’Ordre National des Infirmiers (ONI).
Le vieillissement de la population va s’accélérer à court terme. Et toutes les études confirment, que la proportion des personnes âgées de plus de 65 ans va croître de près de 31 % d’ici à 2040. Cette augmentation des personnes plus âgées implique naturellement une augmentation de la demande de soins.
Ces prévisions, basées sur les évolutions démographiques incontestables, se renforcent encore avec l’augmentation prévisible et déjà connue et chiffrée du nombre de patients atteints de pathologies chroniques. L’expert arrive ainsi à estimer l’augmentation de soins infirmiers d’ici à 2040 en l’évaluant à 54 %. Cette augmentation nécessite donc de disposer du nombre suffisant d‘infirmières et d’infirmiers pour pouvoir répondre à cette augmentation de la demande de soins.
Une croissance démographique pour la profession infirmière suffisante pour faire face à la situation ?
Dans les prochaines années, les infirmières libérales et hospitalières seront-elles assez nombreuses pour pouvoir prendre en charge cette augmentation de la consommation de soins ? Pour répondre à cette question essentielle pour faire évoluer notre système de santé, M. Lacoste a pris en compte tous les éléments à sa disposition à savoir :
- La population actuelle d’infirmières et d’infirmiers, à savoir 504.000 en septembre 2023 ;
- La capacité d’accueil des Instituts en soins Infirmiers (IFSI) pour toutes les années à venir avec la prise en compte également du taux d’obtention du diplôme en fin d’études. Ce taux varie entre une version optimiste, basée sur les calculs de la Direction de la recherche des études de l’évaluation et des statistiques (DREES) estimé à 80,4 % et une évaluation plus contrastée établie par le Comité d’Entente des Formations Infirmières et Cadres (CEFIEC) évalué à 60,8 % ;
- La prévision du nombre de départ en retraite année après année, ainsi que la taux d’attrition de 0,75 % (source : ONI) pour les infirmières et infirmiers quittant la profession avant leur retraite ;
- Etc.
En tenant compte de tous ces critères, Olivier Lacoste a pu établir différents scénarii. La version la plus optimiste évalue la profession du nombre d’infirmières et d’infirmiers à 61, 7 % pour une population infirmière de 815.000 professionnels. Cette version permettrait ainsi de faire face à l’augmentation de la demande de soins.
En revanche la version pessimiste évalue la population infirmière en 2040 à 693.000 professionnels soit une hausse de + 37,5 %, largement inférieure à ce qui est nécessaire pour faire face à la situation. C’est donc une étude mitigée, puisque tout est encore possible. L’ONI a formulé plusieurs propositions pour accompagner ces évolutions. Nul doute, que le ministère de la santé tiendra compte de ces dernières pour parvenir à anticiper ces prévisions.