La question est simple. En revanche, les réponses le sont beaucoup moins. C’est ce que souligne un récent communiqué de la DREES, qui explique que le nombre d’infirmières et d’infirmiers a été largement surévalué depuis une dizaine d’années. Pourquoi et surtout pour quelles conséquences ?
Le nombre d’infirmières, un indicateur clé pour le système santé
Régulièrement, la démographie des professions de santé fait débat. Il s’agit tantôt d’estimer les besoins pour les années à venir, tantôt de pallier la pénurie de certaines professions par une délégation des tâches ou un glissement de compétences. Et en cette période marquée par la crainte d’une augmentation des déserts médicaux mais aussi fortement impactée par deux ans de crise sanitaire, ces données démographiques apparaissent d’autant plus importantes. Les infirmières et infirmiers libéraux ou hospitaliers n’échappent pas à cette contrainte et à cette exigence. Et depuis des années, le nombre d’infirmières et d’infirmiers sont communiqués avec la répartition par région d’une part mais aussi par nature d’activité (établissements de soins, activité libérale ou mixte, …).
Bien que la tâche puisse paraître simple, cet état des lieux à un instant précis du nombre d’infirmières et d’infirmiers exerçant en France n’est pas aussi aisée qu’on pourrait le penser, comme le révèle une récente publication de la Direction des statistiques (DREES). Selon la dernière étude dévoilée en cette mi-juillet, on recenserait en France 637.000 Infirmiers Diplômés d’Etat (IDE) en exercice. Cela représente une baisse conséquente de 17 % depuis le …1er janvier 2021 (764.000 IDE recensés).
Près d’une infirmière sur 5 en moins depuis un an ?
La France aurait donc perdu près d’une infirmière sur 5 en moins d’un an, soit une diminution de 127.000 infirmiers. Les chiffres interrogent, et la DREES explique cet effondrement de la démographie infirmière. En effet, si les études ont été réalisées à partir des mêmes données (le système ADELI), elles prennent en compte toutes les infirmières et infirmiers en âge d’exercer c’est-à-dire avant leur départ à la retraite à 62 ans. C’est sur ce système, que les infirmiers s’enregistraient jusqu’à l’année dernière. Il faudra attendre quelques semaines pour connaitre les mêmes résultats à partir du nouveau dispositif, le Répertoire Partagé des Professionnels de Santé (RPPS). Non seulement la DREES souligne des données non sécurisées mais alerte aussi sur la « qualité (de ces données) s’est nettement dégradée au cours des dix dernières années ». Le communiqué de la DREES estime ainsi, que depuis une dizaine d’années, le nombre d’infirmières et d’infirmiers en activité était surestimé. Si différentes explications sont avancées pour expliquer ces dysfonctionnements, on évoque fortement la sous-représentation des déclarations de cessation d’activité. Cette dernière étude de la DREES pose cependant de nombreuses questions et soulève bien des problématiques.
Pourquoi est-ce important de connaitre le nombre d’infirmières en France ?
Le président de l’ordre des Infirmiers (ONI), M Patrick Chamboredon exprime cette incompréhension :
« Alors que la France est confrontée à des difficultés aiguës de recrutement de soignants, il est aberrant que l’on ne dispose pas, aujourd’hui, de données statistiques fiables sur la population infirmière »
Cette « erreur de calcul » rend difficile les prévisions d’effectif, notamment pour respecter le ratio soignant/patients ou encore la mise en œuvre de stratégie pour rendre plus acceptable les mesures incitatives pour l’installation des infirmières libérales. Les 127.000 infirmières et infirmiers manquant à l’appel impliquent en outre une impossibilité de définir précisément le besoin de formation des nouvelles infirmières pour les années à venir. C’est donc toute la profession, qui se retrouve impactée. Dans son même communiqué, la DREES insiste que la profession infirmière n’est pas la seule concernée par ces erreurs. Il convient, pour toutes les organisations représentatives de la profession et l’ONI, de régulariser la situation dans les meilleurs délais, puisque la démographie infirmière fait partie des axes prioritaires pour lutter contre les déserts médicaux.
Et vous, comprenez-vous que l’on ne puisse connaitre de manière sure et certaine le nombre d’infirmières et d’infirmiers en France ? Quelles pourraient être les pistes pour disposer d’un comptage précis et fiable ?



