ASALEE, cette coopération entre médecin généraliste et IDE est désormais connue de tous (corps médical, patients, autorités publiques, …). En pratique, le suivi de patients souffrant de pathologies chroniques conduit à la délégation de certaines tâchés des médecins vers les infirmiers. Des questions organisationnelles et financières menacent la pérennité de cette coopération.
Asalée, une meilleure coopération entre médecins et infirmières ?
En 2025, les infirmières et les infirmiers libéraux, comme l’ensemble de la communauté soignante, connait le dispositif Asalée. Asalée, un acronyme pour Action de santé libérale en équipe désigne deux éléments distincts :
- Le projet de coopération entre les médecins d’une part et les infirmiers de l’autre. Depuis 2012, ce projet est devenu protocole,
- L’Association créée en 2005, dont l’objectif consiste à la mise en œuvre et à la gestion de cette coopération.
C’est en 2004, que le dispositif trouve son origine dans le département des Deux-Sèvres. Les médecins à l’origine du projet s’efforcent de créer l’association éponyme l’année suivante afin de mettre en « en œuvre une expérimentation ayant pour objet l’amélioration de la qualité des soins… [en] assurant la promotion du travail collaboratif d’infirmières déléguées à la santé publique (IDSP) au sein des cabinets libéraux de médecine générale sur le mode de la délégation de tâches ». Dès l’origine, l’accent est porté sur la « prévention et l’éducation à la santé des patients, l’éducation thérapeutique et l’accompagnement médicosocial de ces derniers. »Après un avis favorable de la Haute Autorité de Santé (HAS), l’Agence Régionale de Santé (ARS) Poitou Charentes valide ce projet de coopération lui donnant le statut de protocole en 2012.
Un dispositif national impliquant infirmiers et médecins pour une prise en charge plus globale des patients !
Dès lors, plusieurs autres ARS déploient le même dispositif sur d’autres territoires. Il devient même un dispositif national applicable sur l’ensemble du territoire à partir du 1er mars 2021. Devenir infirmière Asalée implique de conduire des actions d’éducation thérapeutique, mais cela implique aussi et surtout la « délégation aux infirmiers d’actes dits dérogatoires: prescription de certains examens biologiques, prescription et réalisation d’électrocardiogrammes, prescription, réalisation et interprétation des spirométries et réalisation des examens des pieds dont test au monofilament » dans le cadre de la prise en charge de quatre pathologies chroniques : les patients tabagiques à risque de BPCO, les patients souffrant de diabète de type 2, les patients souffrant de risque cardio-vasculaire et ceux souffrant de troubles cognitifs.
Le développement et la généralisation du dispositif a été continu et fulgurant depuis une vingtaine d’années. On compte aujourd’hui plus de 2.000 infirmières et infirmiers et plus de 9.000 médecins. Cette prise en charge plus globale est saluée par les acteurs de santé, et la place de l’infirmière libérale apparait alors comme centrale.
Une remise en cause du dispositif au moment de l’espoir suscité par la loi infirmière
Dans l’esprit du dispositif, le patient reste au centre de la prise en charge qui doit être globale. Les infirmiers libéraux jouissent alors d’une grande souplesse dans l’organisation de leurs consultations dans le temps. Ces dernières apparaissent comme complémentaires aux autres soins infirmiers, que l’IDEL peut prodiguer au patient. Toujours est-il, que le dispositif Asalée a permis une meilleure reconnaissance du rôle de l’infirmière à l’instar de ce qu’a pu généraliser plus récemment encore l’adoption de la grande loi infirmière.
Toujours est-il, que le dispositif Asalée a été sévèrement mis en cause ces dernières semaines, suite à la publication d’un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) : Contrôle de la gestion et du déploiement du dispositif Asalée
Sur 250 pages, les auteurs du rapport s’efforcent de souligner la pertinence et l’utilité du dispositif tant pour les professionnels de santé concernés que pour les patients. Mais le rapport souligne également de graves dysfonctionnements conduisant à un « constat préoccupant sur la gouvernance du dispositif ». Les auteurs identifient de nombreux conflits d’intérêt, soulignent les défaillances financières mais aussi le non-respect de règles de droit tant en ce qui concerne le fonctionnement de l’association que ce qui touche au travail des professionnels de santé. Enfin, le pilotage est qualifié d’ »hésitant et insuffisamment rigoureux ».
En cette période de rigueur budgétaire, le rapport liste des préconisations conduisant toutes à une remise en cause du dispositif (tel qu’il existe et fonctionne aujourd’hui).
Et demain, quel avenir pour le dispositif Asalée ?
Tous les acteurs ont été consterné à la lecture de ce rapport, tant le médecin que l’infirmière ou encore le patient. C’est d’autant plus regrettable, que des décisions rapides devraient être prises pour assurer la pérennité d’un dispositif ayant déjà fait ces preuves. En revanche, l’instabilité politique, qui caractérise la France depuis plusieurs mois, menace cette rapidité d’action. Soulignons enfin, qu’au même moment, les infirmières et infirmiers libéraux sont déjà en négociation avec l’Assurance Maladie dans le cadre de l’élaboration de l’avenant 11.
Dans ces conditions, l’Ordre National des Infirmiers (ONI) a déjà réagi par communiqué de presse : » L’Ordre national des infirmiers exprime sa vive préoccupation quant aux conséquences que pourrait avoir une remise en cause brutale du dispositif Asalée sur la continuité des soins, en particulier pour les patients atteints de maladies chroniques. »



