Depuis quelques années, tous les secteurs d’activité sont, plus ou moins directement, impactés par l’intelligence artificielle (IA). Ces algorithmes, nourris par des données en masse, sont déjà à l’origine de bien des innovations et laissent entrevoir la multiplication d’opportunités inconcevables il y a peu. Mais ces avancées sont-elles directement profitables aux infirmières et infirmiers libéraux ? La question peut se poser tant pour les IDEL(s) déjà en activité que pour les étudiantes et étudiants engagés dans leur parcours au sein des Instituts de Formation en Soins infirmiers (IFSI).
Quand l’intelligence artificielle se généralise dans le domaine de la santé !
Depuis l’épidémie de coronavirus, toutes les autorités mondiales ont pris conscience des avantages, que pourrait représenter cette innovation majeure qu’est l’IA en matière de santé publique. Selon l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique), les efforts pour contribuer à développer l’IA dans le domaine de la santé devrait être multipliés par 16 d’ici à … 2030. Autant dire, que les opportunités se multiplient à un rythme exponentiel.
De l’aide apportée à la détection de maladies rares notamment et au diagnostic du médecin à l’aide concrète que des plateformes d’assistance technique peuvent apporter aux soignants pendant tout acte chirurgical, l’intelligence artificielle s’impose comme un des leviers les plus pertinents pour faire face aux défis de demain en matière de santé, sur un plan clinique mais aussi pour tout ce qui concerne la gestion « administrative » de la santé.
Cette montée en puissance répond aux aspirations des autorités publiques comme à celles des soignants. En revanche, quels en sont les impacts pour les professionnels de santé de ville, ceux éloignés des grandes structures de soins ? L’infirmière libérale, en zone rurale comme au centre des métropoles, peut-elle compter dès aujourd’hui sur ces progrès annoncés comme en cours de réalisation ? C’est ici, qu’il faut apporter une distinction entre ce que l’IA offre déjà aux IDEL(s), principalement une automatisation de certaines tâches jusqu’ici jugées comme chronophages, et ce que l’avenir peut raisonnablement permettre d’attendre de ces innovations.
L’IA, un partenaire pour simplifier le quotidien de l’infirmière libérale ?
Désormais, de nouveaux outils, développés à partir de l’IA et du Machine Learning, assurent, dans le domaine de la santé, d’exécuter les tâches répétitives, souvent considérées comme les plus chronophages par les soignants. Ainsi la lecture optique d’ordonnance (OCR) ou encore le remplissage automatique de certains dossiers ou formulaires constituent des solutions faisant gagner du temps aux soignants en général et aux infirmiers libéraux en particulier. Des solutions pour automatiser la cotation des soins dispensés aux patients sont en cours de finalisation. Il faudra encore des mois, des années pour que toutes ces possibilités d’automatisation soient conduites à leur terme. En revanche, cette émergence de l’IA au sein du cabinet infirmier ne modifie en rien votre pratique au quotidien. Elle vous fait gagner du temps, vous simplifie la gestion de votre cabinet mais elle n’impacte pas la pratique de votre exercice infirmier.
L’IA, une remplaçante de l’IDEL pour demain ?
En effet, des algorithmes permettent déjà de traiter des données hétérogènes en identifiant les soins à prioriser, en contribuant à l’établissement d’un diagnostic. Dans un futur proche, les infirmiers libéraux peuvent espérer voire apparaître des outils identifiant une éventuelle incompatibilité thérapeutique, anticipant un début de désorientation chez un patient âgé entraînant une vigilance accrue, participant à l’élaboration d’un protocole de soins, ….
La collecte, le partage et l’analyse d’indicateurs médicaux permettra à des intelligences artificielles d’élaborer des programmes préventifs personnalisés et/ou d’optimiser le parcours de soins du patient. Certes à ce stade, l’infirmière libérale reste et restera indispensable, mais elle pourra s’appuyer sur ces innombrables outils pour pouvoir être plus disponible et plus concentrée sur l’essentiel : le patient. L’IA n’a pas vocation à se substituer aux soignants, mais bien à leur permettre d’être plus efficients.
Pourquoi les innovations les plus tendances peinent à pénétrer le cabinet de l’IDEL ?
Aujourd’hui, des solutions sont déjà déployées dans certains services hospitaliers pour aider au diagnostic de certaines pathologies, pour aider à l’élaboration d’un parcours de soins personnalisé et efficace, pour anticiper les pathologies à venir et participer, de manière pro active, à un dispositif individualisé de prévention, … Pourquoi ces avancées ne se généralisent-elles pas dans les cabinets infirmiers et les maisons de santé pluri professionnelle (MSP) ?
Par nature, toutes ces solutions dites d’intelligence artificielle ont besoin d’être « formées » pour commencer et de bénéficier, par la suite, d’une formation continue ininterrompue. Si les flux de données (dossier patient, historique de soins, pratiques de soins, …) sont suffisants dans un centre hospitalier, ils restent largement incomplets au sein d’un cabinet infirmier. Le déploiement d’une intelligence artificielle pour une infirmière libérale nécessiterait obligatoirement l’interconnexion avec d’autres professionnels de santé, d’autres réseaux de soins, d’autres structures, … Si ces interconnexions ne sont pas impossibles à envisager, elles représentent néanmoins une difficulté majeure pour l’IDEL.
Pour la profession d’infirmière, l’utilisation de la technologie découlant de l’IA est déjà une réalité. Mais les applications, devant permettre de faciliter la prise de décision et/ou d’améliorer la prise en charge des patients, devraient se multiplier dans un avenir proche. Des outils pour assister la professionnelle de santé dans l’exercice de son métier et valoriser ainsi ses atouts : ses compétences et l’aspect humain dans la relation de soins.



