À l’approche de la Semaine de la sécurité des patients, les IDEL sont appelés à jouer un rôle central dans la prévention des risques liés aux soins. L’occasion pour faire un point sur la sécurité de ses patients, qui est toujours perfectible.
Du 15 au 19 septembre 2025, le ministère de la Santé organise sa quinzième édition de la semaine de la sécurité des patients (SSP). Bien que cet événement soit organisé par notre cher et tendre ministère de la Santé, il n’est pas uniquement un événement purement institutionnel. En effet, cette semaine est également organisée comme une (bonne) piqûre de rappel pour l’ensemble des professionnels de santé sur un point important : la sécurité des soins n’est pas un acquis, mais un effort collectif et quotidien, auquel chaque soignant — de l’hôpital au cabinet libéral — peut et doit contribuer.
Initiée en 2011, la SSP vise à promouvoir une culture collective de la sécurité, c’est « la pierre angulaire de l’action visant à promouvoir ce thème à l’échelle mondiale. Elle est fermement ancrée dans le principe fondamental de la médecine : D’abord, ne pas nuire », comme le souligne le communiqué du ministère de la Santé, qui précise que « ses objectifs sont d’accroître la sensibilisation et l’engagement du public, d’œuvrer en faveur d’une solidarité mondiale et d’encourager une action des États membres pour promouvoir la sécurité des patients. »
Et durant cette semaine nationale de la sécurité des patients, vous – les IDEL – avez un rôle essentiel à jouer, souvent en première ligne et seules face aux aléas du quotidien et des soins à domicile. Ceux qui pensent (encore) que la SSP est une affaire de CHU et de protocoles hospitaliers feraient bien de faire une tournée avec une IDEL à 6 h 30 du matin. Car c’est aussi — et peut-être surtout — dans les appartements mal chauffés, les maisons trop pleines ou les frigos trop vides que se joue une partie de la sécurité des soins. Le soin, ici, n’est pas orchestré à plusieurs, mais souvent porté à bout de bras par une seule professionnelle. Ce sont vous nos héros du quotidien, ceux qui observent, qui signalent, qui coordonnent, qui corrigent parfois en silence les petites dérives d’un parcours de soin brinquebalant. Et c’est dans cette discrète vigilance que la sécurité prend corps.
Pour autant, bien que vous soyez doués et attentionnés avec vos patients, cette semaine de sensibilisation est aussi une occasion de n’agir autrement que dans l’urgence ou la routine. Nombreuses sont les infirmières (libérales ou pas d’ailleurs) qui, à l’occasion de la SSP, décident de se former, de revisiter leurs pratiques, d’ouvrir le dialogue avec leurs patients, de poser un regard critique sur leurs habitudes.
Des initiatives à taille humaine
Très bien Albus, mais que faire lors de cette semaine ? À l’échelle individuelle, il est bien évidemment possible d’agir lors de cette SSP pour la santé de ses patients, par exemple en s’inscrivant à des webinaires proposés par les URPS ou les ARS, ou participer à des conférences qui peuvent être organisées dans votre ville/région. Ça, c’est pour les plus motivées. Mais sinon, vous pouvez simplement agir et corriger certains points de votre pratique, actualiser vos protocoles, échanger sur les groupes WhatsApp d’infirmiers et/ou avertir vos collègues sur les risques souvent invisibles que recèle le quotidien.
Cette semaine de la sécurité (et de la santé) des patients peut également s’inviter dans vos consultations en remettant au centre de votre métier, la sécurité des patients donc, avec des petits gestes simples, mais qui ont souvent un impact positif sur la santé de vos patients adorés.
Cela peut aller de relever un fauteuil avant de quitter le domicile d’un patient un peu chancelant, de prendre la tension, la température ou la satu d’un patient qui « ne se sent pas très bien » même si ce n’est pas le motif initial de passage, de s’assurer de l’aération du logement, notamment pour les patients avec BPCO ou en période de canicule, de bien vérifier les ordonnances et les piluliers, surtout lors des changements de traitement de vérifier la température du frigo parce qu’un traitement injectable y est conservé, rester quelques minutes de plus auprès d’un patient inhabituellement essoufflé ou encore simplement s’assure que « ça va vraiment » et de rappeler l’importance de l’hygiène (lavage des mains, désinfection des surfaces) notamment en période d’épidémie.
Au fond, que fait une IDEL, sinon veiller ? Veiller à ce que les traitements soient pris correctement, que les plaies cicatrisent dans de bonnes conditions, que les protocoles soient respectés. Mais aussi — et surtout — veiller à ce que la vie autour du soin reste vivable.
La sécurité, ce n’est pas seulement éviter les erreurs. C’est anticiper, prévenir, signaler. C’est comprendre qu’un patient qui ne mange plus n’a pas seulement un problème nutritionnel, mais peut-être une dépression. C’est voir, dans l’accumulation de boîtes de médicaments non ouvertes, le signe d’un refus du soin, ou d’un début de confusion mentale. C’est aussi interroger discrètement l’environnement : est-ce que l’air circule ? Est-ce que le logement est sécurisé ? Est-ce que la tension artérielle n’a pas augmenté depuis la semaine dernière ? Autant de signaux faibles qu’un œil formé repère sans même y penser.
Mais encore faut-il que cet œil reste aiguisé. Et c’est précisément là que la Semaine de la sécurité des patients trouve son utilité : dans cette piqûre de rappel salutaire, qui pousse à faire un pas de côté, à se demander si nos pratiques sont les meilleures possibles — ou simplement les plus commodes. Un moment de recul, pour mieux replonger ensuite dans le grand bain de la tournée, un peu plus armé, un peu plus lucide.
Ne pas banaliser l’essentiel
Dans un exercice libéral souvent sous tension — administratif, logistique, humain —, il est tentant de considérer que la sécurité est acquise, du moins maîtrisée, tant qu’aucun drame ne survient. Et pourtant, c’est souvent dans l’accumulation des détails qu’émergent les dysfonctionnements. Ceux qui ont déjà dû gérer un traitement mal retranscrit, une ordonnance périmée, ou un patient qui double ses doses « parce qu’il avait mal », savent que le pire ne vient pas toujours d’un manque de compétence, mais d’un défaut de coordination, d’information ou d’anticipation.
Alors, non, la Semaine de la sécurité des patients n’est pas une formalité. Elle est une invitation à se souvenir que dans le soin, rien n’est jamais acquis, surtout pas l’essentiel. Et que les infirmières libérales, parce qu’elles sont au cœur des foyers, au plus près de la réalité des patients, sont des actrices de premier plan de cette vigilance collective. Du 15 au 19 septembre, donc, prenons quelques minutes pour penser à la sécurité. Pas celle des protocoles parfaits, mais celle des gestes justes, des regards attentifs et des transmissions précises. Celle qui ne fait pas de bruit, mais qui sauve souvent sans le dire.



